TOUTE ŒUVRE EST HUMAINE

Qui, pétri de questions sur l’âme humaine, ne rêverait de se transporter au seuil de l’humanité, témoin invisible de la première œuvre de notre premier ancêtre ? Qui, témoin scrupuleux de cet accomplissement fondamental, ne se hâterait d’en emplir sa mémoire, d’en décortiquer toutes les séquences ? Qui, pris d’émotion, ne se sentirait mû par une étrange attirance envers cette brute retrouvée au fond des âges, au regard envahi d’une lueur inconnue ? Qui, revenu de cet unique voyage, ne se plongerait dans le souvenir de ce moment d’exception, bouillonnant de ferveur humaine et de questions insolubles ? Qui, pourvu d’outils conceptuels longuement élaborés, ne balancerait entre un orgueil démesuré et un questionnement vertigineux ? Qui n’en sortirait autant émerveillé que songeur, autant dynamisé qu’anéanti ? Qui, ne s’étant laissé envahir par l’absurde suicidaire, ne reprendrait comme Sisyphe la montée vers la colline sacrée de la vie ? Car il n’est d’œuvres que d’hommes ; car il n’est d’œuvres si désincarnées d’apparence qui puissent masquer en elles le germe de la pensée qui les engendra, que ce fût en chemin de lumière, ou au fond d’un obscur labyrinthe. Il n’est d’œuvre qui n’exalte ou ne trahisse son géniteur, qui ne l’enterre ou ne le porte à la lumière, qui ne le sépare du monde ou ne l’y plonge. Entre la Genèse et l’Apocalypse il n’y a que l’œuvre de l’Homme, sous un regard fondamental, sous une lumière indicible.

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