GRANDE MOSQUÉE MAIS PETITS ENTRECHATS

Nous apprenons que le recteur de la Grande mosquée de Paris attaque en justice Michel Houellebecq après des « propos très graves » tenus au sujet des musulmans de France, au cours d’un échange avec le philosophe Michel Onfray dans un numéro de la revue Front populaire de novembre.

CE COMMUNIQUÉ, LE VOICI

Communiqué – La Grande Mosquée de Paris dépose plainte contre Michel Houellebecq (*)

Dans son dernier numéro, largement diffusé, la revue Front Populaire publie une longue conversation entre Michel Onfray et Michel Houellebecq, dans lequel ce dernier déclare :

« Des gens s’arment. Ils se procurent des fusils, prennent des cours dans les stands de tir. Et ce ne sont pas des têtes brûlées. Quand des territoires entiers seront sous contrôle islamique, je pense que des actes de résistance auront lieu. Il y aura des attentats et des fusillades dans des mosquées, dans des cafés fréquentés par les musulmans, bref des Bataclan à l’envers ».

« Le souhait de la population française de souche, comme on dit, ce n’est pas que les musulmans s’assimilent, mais qu’ils cessent de les voler et de les agresser. Ou bien, autre solution, qu’ils s’en aillent ».

Ces phrases lapidaires de Michel Houellebecq sont inacceptables et d’une brutalité sidérante. Elles  ne visent pas à éclairer un quelconque débat public mais à attiser les discours discriminatoires, et les actes. 

Il légitime comme un fait acquis une opposition essentielle entre « les musulmans » et « les Français de souche », pour dire que les musulmans ne seront jamais de vrais Français, et qu’il faut s’en méfier au plus haut point, car ils veulent détruire l’unité du pays. Pour lui, « les musulmans » sont irrécupérables, du fait de leur religion, et la seule chose qu’il faut obtenir, c’est qu’ils arrêtent de voler et d’agresser les Français, ou à défaut de les voir partir.

Or, comme vient de le juger la Cour européenne des droits de l’homme dans « l’affaire Zemmour » (Arrêt du 20 décembre 2022), la lutte contre toutes les discriminations est un devoir, car elles entretiennent les stéréotypes négatifs et destructeurs de la vie sociale.

La Grande Mosquée de Paris rappelle que, dans une société démocratique, la loi permet la critique des religions, et elle accepte totalement ce débat, dans lequel chacun peut apporter la contradiction.

Dans le cas présent cependant, il s’agit d’un appel au rejet et à l’exclusion de la composante musulmane dans son ensemble. Aussi le débat n’est plus possible, et c’est maintenant la stricte application de loi qu’il y a lieu de demander.

Dans ces conditions, la Grande Mosquée de Paris a donc décidé de déposer plainte devant Monsieur le Procureur de la République de Paris pour ces propos qu’elle présume comme étant une provocation à la haine contre les musulmans.

Dans un État de droit, le recours au juge est le moyen normal de débattre en citoyen des violations de la loi, et c’est ce droit qu’exerce la Grande Mosquée de Paris, en s’appuyant sur les jurisprudences rendues pour toutes les religions.

Michel Houellebecq affirme que les musulmans ne sont pas de vrais Français. Les musulmans lui donnent rendez-vous devant le tribunal correctionnel pour lui opposer ce que dit le droit.

Chems-eddine HAFIZ

Recteur de la Grande Mosquée de Paris

UTILISONS NOTRE DROIT À LA PAROLE

Le communiqué du dit recteur reprend pour s’en offusquer les deux passages suivants de Houellebecq :

« Des gens s’arment. Ils se procurent des fusils, prennent des cours dans les stands de tir. Et ce ne sont pas des têtes brûlées. Quand des territoires entiers seront sous contrôle islamique, je pense que des actes de résistance auront lieu. Il y aura des attentats et des fusillades dans des mosquées, dans des cafés fréquentés par les musulmans, bref des Bataclan à l’envers ».

« Le souhait de la population française de souche, comme on dit, ce n’est pas que les musulmans s’assimilent, mais qu’ils cessent de les voler et de les agresser. Ou bien, autre solution, qu’ils s’en aillent ».

S’ensuit un baratin explicatif – du point de vue du recteur  – et largement interprétatif, pour ne pas dire armé d’un préalable procès d’intention. Ensuite il s’appuie sur la récente décision de la Cour européenne des droits de l’homme (arrêt du  Décembre 2022 envers Éric Zemmour). Un petit coup d’anti quelque-chosisme au passage ne nuit pas.

Et comme on ne lui apprendra pas à faire la grimace, il pratique avec une belle indignation l’amalgame si cher à tout ce que la Gauche crache depuis des lustres.

Enfin il en appelle noblement au droit français, à l’État de droit, et probablement à des amis bien pensants.

D’ailleurs, Mme Hidalgo, maire si dévouée aux finances de Paris ne s’y est pas trompée. Elle lui a apporté « tout son soutien ».

Alors, que penser de ce nouvel avatar de l’islam jouant à inverser les rôles, en précisant bien que je n’ai pas l’intégralité de cet entretien ?

D’abord, que la présentation unique de quelques lignes dans un hors-série de 144 pages est une mauvaise parodie de mauvaise mémoire : un temps où Fouquier-Tinville et Robespierre se contentaient de moins pour envoyer l’écrivain suspect vers le « rasoir national ».

Ensuite, même en se contentant de ces quelques lignes, rien ne dit que Michel Houellebecq souhaite la situation décrite. Elle est d’ailleurs non souhaitable. Car une guerre entre Français de souche et Français musulmans ne serait qu’une guerre civile, à savoir la pire des guerres. Il ne la faut pas.

Michel Houellebecq se contente de décrire une situation. Il ne valorise jamais une réponse agressive et armée, mais au contraire, reprend des souhaits raisonnables de personnes exaspérées et anxieuses. Comme dans les conflits menant au possible divorce d’un couple il n’y a que deux solutions valables : que la violence se calme ou que la séparation intervienne.
Où le recteur de la Grande Mosquée voit-il “un appel au rejet et à l’exclusion de la composante musulmane dans son ensemble”?

J’ai la forte impression que le recteur Chems-Eddine Hafiz a sauté sur l’occasion pour… pour quoi au juste ? Pour se montrer juste parmi les justes ? Pour découvrir sa belle âme de réconciliateur se mettant au service de la justice, de l’État de droit et de ses lois ? J’y crois de moins en moins, ni à l’un ni aux autres. Encore faudrait-il que le dit appareil juridique soit sans peur et sans reproche, ou mieux encore, qu’il ne soit pas de gauche, intrinsèquement et misérablement de gauche, donc fomenteur de destruction en paroles, en pensées et en actes.

À moins que M. Chems-Eddine Hafiz ait trouvé ici le moyen de se refaire une silhouette honorable auprès d’un entourage qui l’aurait trouvé trop tiède ?

Ou tout simplement, mouton parmi les moutons, suit-il le vent mauvais qui empuantit la France, souffle la discorde et hurle aux -ismes de toute nature pour recevoir de belles subventions ? C’est facile, ça marche chez les idiots utiles et ça ne risque rien, juste perdre un procès et se parer d’une virginité offensée.

Pourtant, quelque chose me chagrine. C’est le fait que le nom de M. Chems-Eddine Hafiz n’apparaisse qu’en fin, et que la marque de fabrique de ce texte soit bien plus explicite que tout son verbiage.

Alors, qui parle vraiment ? Quelles ramifications s’infiltrent-elles dans le terreau de la Société des Habous et les Lieux Saints de l’Islam ?

Est-il « hallal » ou « hallouf » de poser cette question ? Quel droit interroger ? Celui du fameux État « de droit », ou celui d’une autorité religieuse à multiples facettes ?

Il doit bien y avoir des spécialistes pour répondre. Ce serait intéressant.

Et puis, c’est peut-être bien gentil de traduire l’en-tête français en arabe, mais, légalement, devant un juge, et surtout, psychologiquement, n’est-ce pas là le signe dévoilé d’une certaine volonté de franchissement ? Jusqu’où ?

Alors, à qui véritablement s’adresse ce texte qui se garde bien d’une quelconque référence aux tueurs du Bataclan… à l’endroit ? Que chacun y réfléchisse !

Antoine Solmer

(*) https://www.grandemosqueedeparis.fr/post/communiqu%C3%A9-la-grande-mosqu%C3%A9e-de-paris-d%C3%A9pose-plainte-contre-michel-houellebecq