À peine avais-je posté mon dernier article où le premier prix de déshonneur était distribué à M. le Mal Dit, que l’actualité nous ramène vers le triste sire. Le support en est l’emprisonnement de Boualem Sansal, l’écrivain bien connu, qui pour certains est à prendre avec des pincettes. En effet, il ose penser, dire et écrire des vérités plus que dérangeantes dans l’ambiance néo-staliniste qui se développe. Donc, des pincettes figurées au poucettes chères à certains tortionnaires, il peut n’y avoir qu’un mauvais pas menant en certaines geôles, en l’occurrence, celle de l’Algérie du président Tebboune.
Cela se passait le 16 novembre à l’aéroport d’Alger, en provenance de France. Comme comité d’accueil, il y a mieux. Mais comme raison avancée, il y a plus intéressant : il accusé d’« atteinte à l’unité nationale », avec pour risque plus précis la réclusion à perpétuité.
Comptons bien : entre le 16 et le 21, quatre jours francs, si j’ose dire. Et ce fameux 21, l’ambassadeur de France, larbinait au nom de Macron en déposant une gerbe (et pourquoi pas des pensées » z’émues » – vive Zému ! ) – en l’honneur du plus que célèbre boucher Ben M’Hidi. Je vous en avais cité le reportage du quotidien El Watan.
Comme mélange de manque d’à propos et de honte, pour de pas dire de trahison envers des Français d’Algérie qui en furent les victimes, difficile de faire mieux.
Mais aussi quel fantastique pied au cul ! Car n’oublions pas que Boualem Sansal a été fait citoyen français du fait de l’enfant-prince qui gouverne malheureusement la ville. Dans ces conditions, se faire arrêter en descendant d’un avion en provenance de France, pour « atteinte à l’unité nationale », c’est presque équivalent « d’intelligence avec l’ennemi ».
D’ailleurs, l’agence de presse officielle algérienne APS a reproché, vendredi, à la France de prendre « la défense d’un négationniste qui remet en cause l’existence, l’indépendance, l’histoire, la souveraineté et les frontières de l’Algérie », qualifiant M. Sansal de « pantin utile ».
Pauvre Macron ! Décidément, la collection de coups de pied quelque part doit lui chauffer le train. Mais il ne comprend toujours pas. Et il se réveille comme un somnambule : « très préoccupé », et ayant « mobilisé les services de l’État pour clarifier sa situation ».
Au fait, y a-t-il des services de l’État capables de lui faire une récupération de neurones, une mise à jour des devoirs d’un président envers le pays qu’il doit théoriquement défendre. Bref, des petits cours du soir.
Au fait, j’ai cherché sur El Watan. Le dernier article sur Boualem Sansal remonte au 8 juillet 2023. On le citait comme co-lauréat du Prix Littéraire Constantinople, qui valorise des écrivains jetant un pont des deux côtés du Bosphore, entre l’Orient et l’Occident.
Mais de son emprisonnement, rien !
Quelle merveilleuse diplomatie que la nôtre ! Et quel chef merveilleux, en maître des horloges démontées ! Pourra-t-il un jour comprendre qu’entre Algérie et Maroc, et autres pays africains, il ne comprend rien. Et pour le reste du monde, pas plus, d’ailleurs. Rien sauf sa pathologique envie de passer pour un guerrier invincible.
Triste et dangereux.
Antoine Solmer