Comme il serait doux d’écrire un gentil article sur le dernier livre que je viens de relire (C’est Mozart qu’on assassine de Gilbert Cesbron). Je ne résiste pas au plaisir d’une citation :
« C’était jeudi, jour de récréation des instituteurs, celui où, par toute la France, on met le linge à sécher dans les cours d’école. Nounou Perraut, qui révérait le Savoir, revêtit sa jupe neuve (laquelle était seulement un peu plus noire que l’autre) pour aller présenter Martin à M. Thirolaix.
C’était un homme tout gris qui semblait avoir assorti son austère blouse de travail à la teinte de ses cheveux et à celle de son regard. Jusque dans le plus turbulent des cancres il respectait l’Homme, sa Liberté, sa Dignité, car il vivait dans un monde de majuscules héritées des hommes de 1848 et de ceux de la grande révolution. On l’eût tué net en suggérant que ces derniers n’étaient, pour la plupart, que de sanglants cabotins servis par quelques écrivains géniaux et de fougueux militaires. Dans l’église de M. Thirolaix, Marat, Danton et Robespierre figuraient la Sainte Trinité, Saint-Just l’archange Gabriel et Lucile Desmoulins la vierge Marie. Lorsqu’il passait devant la mairie, les trois mots inscrits à son fronton lui faisaient encore battre le cœur, à cinquante ans passés. Il était le seul « homme de gauche » du pays (la malheureuse Mme Thirolaix continuait d’aller à la messe), et cette solitude sacrée contribuait à le rapprocher du curé. Il se voyait contraint de l’estimer plus que tout autre habitant du village, et c’était l’un de ses tourments. Tel Nicodème à Jésus, il lui rendait des visites nocturnes, courroucé et ravi de trouver en lui une culture et une bienveillance égales aux siennes ainsi qu’une dévotion à quelques majuscules : Charité, Espérance, Pauvreté qui ressemblaient furieusement à ses propres déesses. Il se consolait en songeant que l’autre était une exception ; le curé aussi.[1] »
Cela avait encore un sens en 1966. Mais nous sommes en 2020, Macron présidant et islamo-gauchistes psalmodiant. Ça change la donne. Et nous voici avec deux guerres sur les bras.
Dans l’une, le président nomme clairement l’ennemi : le virus. Il est prêt à dégainer boucliers estampillés et armes létales de compétition pour écraser l’ennemi. Avec l’armée en plus. Chargez !
Dans l’autre, on nomme comme ennemi « le terrorisme ». Mais qui manie ce terrorisme ? Mystère ! C’est oublier que le terrorisme n’est qu’une arme, comme n’importe quel couteau de cuisine, et que si l’on fait la chasse aux « armes » il faudra perquisitionner tous les boucheries, puis les restaurants, puis les cuisines, et autres lieux. Ensuite on passera aux marteaux, aux faucilles (attention à ne pas faire d’amalgame !) aux cordes et cordelettes, etc. Tout cela avec des lois à revendre, bien entendu. L’ultime loi imposera d’amputer des deux mains tous les passants suspects avant d’en dénicher d’autres dans les quartiers « sensibles » (Faubourg Saint-Germain, Paris XVIe, Triangle d’or en premier). Un député inspiré proposera un amendement : seule la main la plus forte sera amputée. Il faudra recenser les droitiers et les gauchers… et aussi prévoir quelques exceptions (mineurs accompagnés, non isolés, femmes enceintes, malades du Parkinson, etc.) Restons Français dans un État de droit !
Bref, dans l’une de ces guerres on est masqué pour démasquer l’ennemi. Dans l’autre on est émasculé pour se masquer l’ennemi.
Devinez la suite…
Restons Français, mais pas pour très longtemps. Sauf si… ?
[1] Chez Robert Laffont, page 174-175