UN CINQ JUILLET : MASSACRE À ORAN

Avec un peu de retard, je partage un article d’Éric de Mascureau publié sur Boulevard Voltaire la semaine dernière[1].

5 JUILLET 1962 : ORAN, UN MASSACRE OUBLIÉ AU JOUR DE L’INDÉPENDANCE ALGÉRIENNE

Si la France a multiplié les gestes de repentance, la réciprocité mémorielle de l’Algérie fait toujours défaut.

Le 5 juillet 1962 est célébré en Algérie comme un jour de fête nationale, celui de son indépendance. Après plus de sept années d’un conflit meurtrier, le jeune État arrachait sa liberté au prix d’une guerre douloureuse, conclue officiellement par un cessez-le-feu entré en vigueur le 19 mars 1962, au lendemain de la signature des accords d’Évian. Pourtant, malgré cette paix officiellement scellée, un carnage parmi les plus odieux fut commis le jour même où l’Algérie proclamait sa souveraineté. Ce jour-là, à Oran, des centaines de pieds-noirs et d’Européens furent victimes d’un crime massif et aveugle. Ce massacre, trop longtemps oublié, révèle une vérité dérangeante : l’histoire de l’Algérie indépendante a commencé dans le sang, par un crime impuni, sur fond de haine ethnique, en pleine violation d’une paix négociée.

Une situation loin d’être apaisée

Malgré les accords d’Évian signés le 18 mars 1962, suivis d’un cessez-le-feu dès le 19, la violence en effet ne cesse pas : elle s’intensifie, au contraire, dans un climat d’impunité et d’abandon. L’historien Jean-Jacques Jordi, spécialiste des disparus européens en Algérie, explique, dans un rapport relayé par la sénatrice LR Valérie Boyer en 2024, que « de 1955 jusqu’aux accords d’Évian (18 mars 1962), il y a à peu près 330 disparus civils. On pouvait s’attendre qu’après les accords d’Évian, ce chiffre baisserait. Or, entre les accords d’Évian et la date d’indépendance (5 juillet 1962), c’est-à-dire en quelques semaines, il y en a près de 600. Donc deux fois plus en 4 mois qu’en 6 ans de guerre ». Le massacre du 5 juillet s’inscrit dans cette montée des violences alimentée par un climat de vengeance et d’anarchie.

Le crime d’Oran

À Oran, ce 5 juillet, une foule de civils algériens venus des quartiers musulmans descendent dans les rues pour célébrer l’indépendance. Ils pénètrent les quartiers européens où la population se cache en raison du climat d’incertitude qui règne sur l’avenir des pieds-noirs. Vers 11 heures, des coups de feu retentissent. On entend crier : « C’est l’OAS ! » La panique se propage. En représailles contre cette prétendue attaque, des membres de l’ALN (Armée de libération nationale) et des éléments de l’ATO (Auxiliaires temporaires occasionnels, censés remplacer les policiers français) se livrent à des exactions massives. Selon le ministère des Armées, des Européens « sont capturés, lynchés, mutilés, exécutés sommairement ». Les corps sont ensuite jetés dans des fosses communes ou dans un lac proche.

À ce sujet — Massacre du 5 juillet 1962 à Oran : une honte française et algérienne

Les 18.000 soldats français du Groupement autonome d’Oran (GAOR), toujours présents mais désormais sous mandat limité, n’interviennent pas. Le général Katz, leur commandant, déclarera plus tard qu’il n’avait pas l’autorisation de rétablir l’ordre, celui-ci ayant été transféré aux autorités algériennes devenues souveraines. Cette passivité, imposée par la volonté politique de ne pas entraver le processus d’indépendance, a ainsi laissé perpétrer un massacre.

Un bilan atroce

Au lendemain de l’indépendance, Oran ressemble à un charnier à ciel ouvert. Les chiffres varient, mais les historiens s’accordent sur environ 700 civils européens tués ou disparus. Le Monde rapporte que certains corps furent retrouvés pendus à des crocs de bouchers, mutilés ou abandonnés dans des bennes à ordures, témoignant d’une brutalité barbare et d’une volonté délibérée d’humilier les victimes même dans la mort.

Pendant près de 60 ans, ce crime est resté oublié, éclipsé par les enjeux diplomatiques et mémoriels entre la France et l’Algérie. Il faudra attendre janvier 2022 pour que le Président Emmanuel Macron, dans un discours reconnaissant aussi la responsabilité de la France dans la fusillade de la rue d’Isly, évoque explicitement ce massacre « où des centaines d’Européens, essentiellement des Français, furent massacrés. Ce massacre […] doit être regardé en face et reconnu ». Par cette harangue, le président de la République exhorta alors l’Algérie à reconnaître ce crime.

Cette supplique resta lettre morte auprès du gouvernement algérien, qui n’apporta aucune réponse. Le silence continue de résonner encore aujourd’hui, en ce jour fêté en Algérie comme une victoire, mais vécu en France comme un deuil. Il rappelle cruellement que, si la France a multiplié les gestes de repentance, la réciprocité mémorielle de l’Algérie fait toujours défaut.

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REVENONS AUX FONDAMENTAUX

Ce 5 juillet consacre à jamais cet « épisode » d’un des lâchages les plus honteux de l’histoire de France. Je pourrais en donner un témoignage direct. Je préfère m’en passer, car « ça ne passe pas » même plus de 60 ans après.

Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que la lâcheté n’a pour effet que d’aggraver les situations politiques. En effet, comme il est dit dans l’article : « Les 18.000 soldats français du Groupement autonome d’Oran (GAOR), toujours présents mais désormais sous mandat limité, n’interviennent pas. Le général Katz, leur commandant, déclarera plus tard qu’il n’avait pas l’autorisation de rétablir l’ordre, celui-ci ayant été transféré aux autorités algériennes devenues souveraines. Cette passivité, imposée par la volonté politique de ne pas entraver le processus d’indépendance, a ainsi laissé perpétrer un massacre. »

Dans la citation ci-dessus il est bien question du général Katz qui mérita plus que largement son surnom « le bourreau d’Oran », et cela bien avant ce triste 5 juillet. Mais il y a pire : la noyade du poisson pourri : « la volonté politique ».

Sous, mais bien mal caché, se trouve un nom : de Gaulle. Car un général comme Katz, si massacreur fut-il, surtout nommé pour ses capacités à obéir sans état d’âme (imaginons qu’il en eût été doté) obéit toujours à l’autorité supérieure, non pour prendre, mais pour répercuter les décisions venues d’en haut. Et d’où venaient-elles sinon de l’Élysée. Encore une tache de sang sur les trop fameuses deux étoiles.

Certains, toujours à Gauche, veulent cacher, sinon expliquer, ce massacre du 5 juillet 1962 par celui de Sétif après les manifestions indépendantistes du 8 mai 1945, lesquelles commencèrent par le massacre d’une centaine d’Européens après une provocation (possible mais discutée…). L’armée interviendra ensuite avec force, manifestement trop de force. Un, deux, quarante milliers de morts musulmans ? Trop, c’est trop, et surtout, c’est contre-productif. C’est même une faute politique. La preuve, les gauchistes la ressortent encore, avec cette exagération mensongère qui est leur marque de fabrique.

Alors commence une répression de longue durée (sept semaines), avec aviation, tirs depuis le croiseur Duguay-Trouin, le contre-torpilleur Le Triomphant, et autres délires terrestres. Mais ici aussi, aucun général sur place ne se serait lancé dans une telle opération sans l’ordre de l’autorité suprême. Et qui la possédait à ce moment : une fois de plus, de Gaulle, alors président du Gouvernement Provisoire de la République française qui a envoyé un télégramme le 11 mai (trois jours seulement après la première manifestation) pour ordonner l’intervention de l’armée.

Il est curieux – enfin, pas vraiment – que les gaullistes « oublient » systématiquement les interventions de leur dieu de pacotille dans ce genre de massacres, qui furent aussi des fautes géopolitiques profondes. La suite, on la connaît, du moins, si l’on veut ouvrir les yeux et quelques neurones. La haine et le mépris du vieillard de Colombey pour tout ce qui dépassait les frontières de la Métropole ont pesé lourd dans ses décisions funestes. Funestes, non seulement pour les Français qui en ont souffert (je n’exclus pas les musulmans) mais aussi pour le destin de la France, sa capitulation devant l’Algérie, en 1962 ainsi que son envahissement. Je rappelle au passage les trop fameux « accords de 1968 » : par qui ont-ils été signés, sinon par le même fossoyeur ? Curieux encore qu’on oublie de le rappeler !

En ce sens de Gaulle et Macron, mêmes haines, mêmes incompréhensions, mêmes défaites, mêmes glorioles frelatées… et mêmes trahisons.

Et les Français ne veulent toujours pas comprendre, encore moins se réveiller, encore moins se confronter aux dépeceurs de la France.

Alors, bonne chance pour votre intégration dans la RIF (République Islamique de France).

Antoine Solmer

[1] https://www.bvoltaire.fr/5-juillet-1962-oran-un-massacre-oublie-au-jour-de-lindependance-algerienne/