- Nous vivons tout de même une époque fantastique : toute seule et sans que personne ne lui ait rien demandé, elle arrive à endosser et à sublimer la totalité des défauts qui ont empêché, à travers les âges, l’humanité de trouver sa place, son équilibre, son identité… donc son bonheur ! Notre monde est peuplé – et il en meurt, d’ailleurs – de surdiplômés qui prétendent se rêver paysans, de gens assis qui se veulent aventuriers, de donneurs de leçons qui croient se substituer aux écoliers, et – ce sont les mêmes ! – de nuls qui se pensent intelligents ! (“J’ai les noms”… ajoutait Coluche !).
- Combien de fois l’avons-nous entendu, ce fabricant de poncifs qui pollue nos petits écrans en discourant avec autorité sur absolument tout ce qu’il ignore tout aussi absolument ? Il est là, poussah assis comme sur un trône, faisant l’éloge conjoint (à écrire en deux mots, ici !) de la marche et du mouvement. Il est bouffi de son savoir ès-toutes choses, au point de se sentir investi du devoir de nous expliquer les charmes de la table rase, du retour aux sources, de la naïveté baptisée vertu cardinale, de la décroissance, s’autorisant même un éloge du farniente, du télé-travail et de la RTT réunis… voire de la guerre préventive contre un ennemi qui pourrait menacer notre long terme, un jour : “autant – dit-il – lui déclarer la guerre, là, et mourir tout de suite”…
- Les plus malhonnêtes ont poussé le bouchon jusqu’à voter la semaine de 35 heures comme susceptible d’être “une conquête sociale” et une victoire du genre humain sur la société… qui 25 ans plus tard, est incapable de se remettre de ce coup fatal… D’autres re-baptisent “fraternité” le fait d’assassiner ceux qui ne produisent plus rien pour la société, et “dignité” l’abandon de la vie… Jamais autant qu’aujourd’hui n’a-t-on eu le droit d’affirmer que “les mots tuent”. On se demande même s’il ne faudrait pas dire : “Les mots, seuls, tuent vraiment…”.
- Nos apprentis sorciers imaginent leur savoir si encyclopédique qu’ils se paient le luxe de vanter les bienfaits (?) de l’ignorance et les avantages douteux de “la page blanche”… d’où ils vont tirer que le comble du bonheur futur sera dans la grossièreté, la vulgarité promue “distinction”, la mauvaise éducation devenue agression et récrimination permanente, l’inculture caricaturale… et l’assistanat, incontournable pour les enfants des autres (qu’ils désignent par “nos enfants”, ceux qu’ils n’ont pas eus, sans qu’il soit possible d’établir le moindre rapport entre les prémisses et la conclusion : leurs syllogismes sont illogiques, et eux, trop bouffis de leur importance auto-proclamée pour pouvoir s’en rendre compte !)
- Moins ils comprennent le monde, et plus ils plastronnent : rien de tel qu’un orateur pour expliquer le silence… qu’une pensée architecturée pour décrire l’anarchie… qu’un haut fonctionnaire-à-vie pour expliquer les avantages de l’allocation-chômage… qu’un ex-prix de thème pour vanter les qualités poétiques ou autres du dernier de la classe… qu’un énarque, qui a tout et n’en tire rien, pour déclarer “bonne” l’étoile de celui qui n’a rien et en tire ce qu’il peut… ou qu’un démocrate “façon Sciences-Po” pour excuser les dérives survenues très loin de là, ou tout près de lui mais à des gens qui ne sont pas “du même monde que lui”… ou qu’un exempté de tout service militaire pour rêver d’en découdre avec l’armée russe… Mais la contradiction n’a-t-elle pas toujours fait partie des “impedimenta” que l’homme, cet éternel nomade, traînait avec lui ?
- Dimanche dernier, sortant de ma messe dominicale chez “mes” petites sœurs de Bethléem, je suis tombé sur un ami (une vague “relation”, plutôt) qui passait par là, par pur hasard, et qui m’a susurré que lui n’entrait plus dans des endroits aussi peu fréquentables qu’une église (sous-entendu : pas comme les idiots qui n’ont pas encore trouvé les bienfaits du “Non” –que moi, je ne veux pas connaître : “à chacun selon ses mérites”, disait Étienne-Gabriel Morelly, “le philosophe oublié”, dans son “Code de la Nature” (1755, donc “une lumière”), idée reprise en 1840 dans “Voyage en Icarie” par Étienne Cabet, théoricien du “communisme chrétien”(sic ! Le nom, seul, me donne envie de pouffer de tristesse ! Car il y en a eu aussi, des cons, avant nous ! Ça rassure !).
- Bref cette autorité morale uniformément reconnue par lui-même m’a abreuvé des poncifs mille fois entendus : notre civilisation est trop hypocrite… notre vieux continent, fichu… le christianisme n’est qu’un souvenir en Europe… qui, elle-même n’est plus qu’un mot, une enveloppe vide. Ne pensant qu’à fuir, je n’ai pas éprouvé le besoin de lui expliquer que pendant qu’il psittacisait ses lieux communs, je pensais à ma joie d’être né dans un lieu où les sagesses gréco-latines (comme lui et moi) et judéo-chrétiennes (pour moi seul) s’étaient mêlées pour donner naissance à cette idée folle qu’on appelle “Liberté”, ce concept qui, précisément, lui permet le choix d’entrer ou non dans une église, et – pour moi – de revisiter avec extase Saint-Étienne du Mont et son jubé, Saint-Séverin et son pilier-palmier improbable ou Saint-Sulpice et les 106 jeux de son orgue, en espérant qu’un organiste viendra répéter à ce moment-là…
- Les grands esprits microscopiques qui nous dirigent ont tué en eux l’enfant qu’ils n’ont peut être même jamais été : ce sont des comptables (dont une définition est : “ce sont des tables avec des gens autour…”!), des gestionnaires ou des contrôleurs de gestion, des régisseurs ou des administrateurs, des préposés aux normes et aux formulaires qui ne voient leurs semblables que comme derrière un guichet, entre deux classeurs… mais ont oublié ce que c’était qu’un sourire. Et lorsqu’ils parlent de “nos enfants” (ceux qu’ils n’auront jamais : il est bien trop tard, et ils ne savent plus en faire !) et de “leur futur” (qui fait peur aux êtres vivants, qu’ils ne sont plus), on a l’impression de lire une norme en pleine élaboration… Là où les hommes, assurés du minimum vital, ont besoin de dignité, de reconnaissance, de tendresse, (merci, Maslow !), de vérité et de mots simples, ils ne proposent que des chiffres triturés, de leur morale amorale, et d’une anti-économie dépensière… sous couvert de “concret”, ce premier stade de la chute vers la mort…
- Pourtant, paysans de tous les pays ou pas, un vent de fraîcheur semble s’être levé sur le monde… Ici, là, un peu partout, les structures bureaucratiques craquent, les normes se fissurent, les gens – je veux dire : “les vrais gens”, ni nos politiciens retardataires (dont il est urgent de se débarrasser), ni les collaborationnistes “fans” de ces idéologies sans idées qui ont rendu les hommes fous et malheureux depuis le XVIIIe siècle et ont engendré tant de monstres indésirables en “–isme”, pas plus que ceux qui tentent de s’inventer une nouvelle jeunesse (déjà vieille) mais qui sont au moins “aussi pires” (car drogués à tout ce qui assassine l’Humanité depuis 6 ou 7 ans : le faux écologisme, le wokisme, l’indigénisme, le décolonialisme pathologique, le racisme-à-toutes-les-sauces, le faux féminisme dément, le “cancel-culture” qui est un authentique “cancel l’Humanité”, etc… il y en a trop, disent les réseaux sociaux, de ces psychotropes pour psychopathes très haut placés… ou très haut consommés).
- Les hommes se révoltent, dans tous les pays, à commencer par ceux qui sont les plus soumis à l’ordre désordonné actuel… Redressons la tête : tout n’est pas perdu ! Ça ne va pas être facile, mais au moins, l’espoir renaît. Comme il nous manquait !
- H-Cl