UNE ÉCOLE EN 1928 : LA CONDAMNATION DE « L’ÉDUCATION NATIONALE »

PETITE GRAMMAIRE DU SIÈCLE PASSÉ
PETITE GRAMMAIRE DU SIÈCLE PASSÉ

Au hasard de mes achats de livres d’occasion, je trouve un merveilleux petite livre d’école : Le Livre unique de français, par Lucien Dumas, pour le cours moyen et supérieur et le certificat d’études. Le copyright date de 1928. Ce Livre unique de français me ramène à mon enfance : c’est grâce à lui, entre autres, que je suis devenu cet amoureux de la langue française qui ne supporte pas les fautes d’orthographe, les imprécisions, l’envahissement du franglais pour ignares en bilinguisme, sans compter les barbarismes crachés entre deux raclements de gosier et autres déliquescences. Ce merveilleux ouvrage était encore en usage dans les années 1960. À cette époque le conglomérat « ministère – éditeurs scolaires » gardait quelque retenue. Cette période est révolue, laissant place à la plongée dans la soupe grasse où la France se dilue.

Je reviens à cette discrète richesse. J’y ai retrouvé le même émoi que jadis, en relisant « La Mort de Guerriot, le petit écureuil », de Louis Pergaud, extrait de De Goupil à Margot. Je ne peux me retenir d’en copier les derniers paragraphes :

« Il aurait voulu fuir et ne voyait point de danger. Il sentait pourtant quelque chose d’angoissant qu’il ne comprenait pas, qui pourtant le menaçait et le liait à cet assemblage étrange que ses yeux ne pouvaient plus quitter, fascinés qu’ils étaient par ce trou fixe et sans paupière…

Guerriot va secouer ce charme… Trop tard ! Un éclair rouge jaillit de l’œil vide, un saisissement plus grand et plus fou perce le petit crâne bossué et cingle, sous le poitrail blanc, le cœur chaud de la pauvre bête qui sauta et dégringola sur le sol, encore aux dents la grosse noisette jaune qu’elle serrait plus fort entre ses petites mâchoires raidies par l’étonnement suprême de la mort. »

Combien d’enfants contemporains, saturés de clips sauvages, esclaves de boutons à cliquer et autres systèmes de décérébrations – et combien de leurs parents déjà soumis aux délires de la Déséducation nationale – sortiraient haut-la-main des petits exercices de grammaire accompagnant le texte précédent que vous trouvez en illustration ?

Qu’en dirait le pauvre Lucien Dumas, dont le glorieux titre était « directeur d’école à Paris » ? Qu’en 120 textes accompagnés des leçons de grammaire adéquates, la langue française était réputée dans le monde. Maintenant…