MACRON, SÉPARATISTE DE LA RÉALITÉ DES IMAMS

Je crois que la pire critique, qui est en même temps la délégitimation d’un prétendu représentant d’une nation, à tout niveau, reste l’apostrophe de cet article :  “séparatiste de la réalité”.  Je l’ai écrit sous une autre forme : “Sans le terrain, le cerveau tend vers le vide”. On pourra m’ objecter la parenté du vide et du trop-plein. Je n’y verrai pas de contradiction. En effet, le vide déconnecté du terrain ne peut que tendre à se gonfler jusqu’au trop-plein d’idées creuses. Et le trop-plein refusant le terrain ne sera que bouillonnement stérile et stérilisant. Bref, du macronisme mâtiné de gauchisme qui ne peut même pas se corriger.

LE DISCOURS DES MUREAUX

Mais, retour au titre complet : “séparatiste de la réalité des imams”. Je fais allusion au discours dit “des Mureaux” tenu le 2 octobre 2020 qui commence ainsi :

« Le problème, c’est le séparatisme islamiste. Ce projet conscient, théorisé, politico-religieux, qui se concrétise par des écarts répétés avec les valeurs de la République, qui se traduit souvent par la constitution d’une contre-société et dont les manifestations sont la déscolarisation des enfants, le développement de pratiques sportives, culturelles communautarisées qui sont le prétexte à l’enseignement de principes qui ne sont pas conformes aux lois de la République. »

Ça part en flèche, ça clame, ça théâtralise… et ça retombe dans la cacopolitique du vide hors sol. D’abord, l’argent, comme si toute solution passait par l’argent distribué au mille-feuille des Danaïdes. Ensuite, une cible à trois cercles :

« La nécessité de libérer l’islam en France des influences étrangères. Il sera mis fin au système des imams détachés.

La volonté de protéger les responsables des mosquées des prises de contrôle hostiles par des extrémistes. Des dispositifs anti-putsch seront créés.

L’ambition de former et promouvoir en France une génération d’imams et d’intellectuels qui défendent un islam pleinement compatible avec les valeurs de la République. »

LA RÉALITÉ DÉCRYPTÉE PAR DEUX PERSONNES LUCIDES

Ces deux personnes sont Marie-Thérèse Urvoy, auteur d’Islam et Islamisme, frères ennemis ou frères siamois, (éditions Artège) et Yves Mamou qui a publié Le Grand Abandon (éditions de l’Artilleur).

La première est professeur émérite d’islamologie et de philosophie arabe, et bardée d’autres titres et publications.

Le second a travaillé plus de vingt ans au Monde, où il était spécialiste de questions économiques. Il a osé publier sur son « mur » Facebook :

« L’islam et l’islamisme se propagent en France avec une facilité déconcertante : la multiplication du nombre de mosquées, de femmes voilées ou de commerces halal modifient à grande allure les paysages urbains. L’immigration musulmane augmente, le terrorisme islamiste meurtrit la nation mais la justice pourchasse comme raciste la moindre déclaration “islamophobe” ».

Oser dire la vérité lui a valu un article d’un blog de Mediapart intitulé : « Quand la judéo-facho-sphère verse dans un racisme antimusulman délirant [1]. » sous forme d’insulte, un brevet de lucidité, donné par Guillaume Weill-Raynal, frère jumeau de Clément Weill-Raynal.

La fiche de Wikipédia de ce Guillaume précise qu’il est « en profonde divergence » avec Clément [2]. Je rappelle que ce dernier avait porté à la connaissance publique le fameux « Mur des cons », ce tableau de déshonneur du Syndicat de la magistrature. Deux jumeaux, deux mondes ! Devinez lequel a ma préférence !

Le scénario exposé, venons-en au dialogue principal

LES THÈMES DÉVELOPPÉS PAR Mme URVOY ET YVES MAMOU

Les organisations subversives musulmanes savent utiliser l’argent que leur donnent les États qui ne comprennent rien. Leur stratégie est simple et lucide, comme le dit l’imam Iquihoussen : « Nous gagnerons grâce à vos lois et nous vous gouvernerons par les nôtres. » Et pour avancer leurs pions, ils savent traiter avec les candidats : nos voix en échange d’argent.

Comme le dit courtoisement Mme Urvoy, les mesures du gouvernement sont inutiles, et ne profitent qu’aux musulmans. Entre les islamistes et les musulmans, tout n’est qu’une question de degré : les premiers obéissent scrupuleusement à leur propre loi (charî’a) alors que les seconds prennent leurs distances.

Yves Mamou précise :

La formation des imams est dans une impasse. Elle ne s’est pas modifiée jusqu’à la fin des années 1990, période pendant laquelle elle dépendait de leurs pays d’origine. Puis l’islamisme a déstabilisé ces mêmes pays.

Alors, par des idées de technocrates, on en est venu à inviter ces personnes à la table de la République, comme cela avait été fait avec les catholiques et les juifs. Et depuis trente ans, on est dans cette impasse. Mais la situation s’est dégradée car les organisations islamistes se combattent pour tenter d’accaparer les rôles de représentants structurants.

Pendant ce temps, l’État n’impose pas ses règles, tout en voulant se mêler de former des imams par l’intermédiaire d’organisations qui lui échappent. Par exemple, l’association Musulmans de France, ex UOIF, bien proche des Frères musulmans.

Le comble est que l’association des Frères musulmans est bannie dans bien des États musulmans alors que la porte leur est ouverte en Europe.

Mme Urvoi explique pourquoi il est compliqué de mettre en place un schéma satisfaisant de formation des imams.

La première raison est que la France ignore (ou veut ignorer) la structure interne de l’islam. Le point fondamental est qu’il n’existe pas de magistère en Islam, du type chrétien ou juif.

S’il existe en islam chiite (minoritaire sauf en cerains pays comme l’Iran) une certaine hiérarchisation de la fonction sacrale, l’islam sunnite (majoritaire ici) dépend de catégories d’experts dans l’ouma (la communauté). Or, il suffit de deux personnes pour former l’ouma. Et rien n’empêche l’une des deux de prendre la place d’imam, recteur de la mosquée, chargé d’organiser le prêche du vendredi. Ce groupe de deux personnes est le nombre minimal théorique. Mais en pratique, pour de plus grands groupes, la désignation de l’imam reste interne.

D’autres personnages se distribuent les rôles fondamentaux : d’abord le muphti qui prononce les fatwa (jugements pour défendre l’islam après consultation juridique d’après le fikh, ou « compréhension profonde des lois de la religion). Ensuite le cadi, juge au tribunal islamique.

Cette grande erreur des Occidentaux concernant la structure de l’islam profite toujours aux musulmans.

Yves Mamou veut poser le problème différemment.

Face à un mouvement totalitaire (ce qui est différent d’une religion), essayer de traiter par la négociation revient à l’aveuglement insensé connu depuis trente ans.

Toute concession pour un illusoire apaisement renforce la dynamique conquérante de l’islamisme et de l’islam.

Emmanuel Macron a eu l’idée saugrenue de penser que la violence liée à l’islam était due à la société française non accueillante. Il a fini par reconnaître son erreur, jusqu’à lancer cette idée de loi contre le séparatisme musulman.

Mais ce n’est pas les musulmans qu’il faut reformater, mais les islamistes. La dissolution de ces groupes s’impose. Et aussi tenir le seul discours qui s’impose : respecter les règles.

Mais pendant ce temps les subventions européennes par millions arrivent à ces groupes !

Comment réagir ? Voici le résumé de Mme Urvoy

Il faut déjà constater les dégâts. La dissolution s’impose, c’est évident. Pour elle la question de « l’islam des lumières » ne se pose pas, car il n’existe pas. Le meilleur degré serait un musulman s’assimilant complètement en prenant une certaine distance avec ces textes fondamentaux. C’est souhaitable, mais irréaliste actuellement.

Les erreurs de l’Occident profitent aux musulmans de toutes les nuances.

Elle cite une anecdote personnelle. Il y a quelques années, il lui avait été demandé un rapport par des sénateurs. En le rendant elle ne reçut que cette réponse : « Vous êtes bien pessimiste. » Le rapport ne devait ressortir que trois ans plus tard. Trois ans perdus, comme d’habitude.  Et pendant ce temps…

Pour elle, le discours de Macron est encore une concession cachée que les musulmans ont vite comprise.

Lorsque Darmanin claironne la fermeture d’une mosquée, cette fermeture ne s’applique… que pendant six mois !

Toutes ces mesures sont ineptes et inefficaces si on applique des lois de même nature. Alors il faut changer ces lois totalement inefficaces, pour ne pas dire qu’elles nous mènent à notre perte.

Mme Urvoy insiste : les lois sont faites pour protéger les humains, non pour les piéger.

Et la situation empire, car le même problème se pose pour le renvoi des clandestins, transformés en « réfugiés », bientôt « climatique ».

Yves Mamou revient sur la formation des imams en France

L’État ne peut pas et ne doit pas les former. Alors il délègue la tâche à des formations islamistes. C’est une impasse.

Le rôle de l’État est de faire respecter la loi en France. Mais la vraie raison est que bien des musulmans sont français et votent. On imagine les appels de part et d’autre.

Sur cette formation, Mme Urvoy fait entendre sa voix

Elle reprend la célèbre formule de Fouché : « C’est plus qu’une erreur, c’est une faute. »

Si l’idée est légitime, la réalisation est difficile. Où et par qui ? On a proposé cela à des universités qui ont refusé « pour respecter la laïcité ». Alors, comme agit tout bon technocrate, on a modulé la formule : «  Former des imams à la laïcité » sous couvert de nouvelle dénomination.

Et les seuls « formateurs » se trouvent… dans des facultés catholiques !

MA VOIX AU CHAPITRE

Je me suis contenté de reprendre l’entretien mené ce jour dans l’émission Ligne droite de Clémence Houdiakova, partie consacrée à la « Table ronde ».

Mon texte n’est pas verbatim, mais je ne pense pas en avoir trahi l’esprit, même si j’y ai ajouté deux ou trois formules personnelles.

De toute façon, rien ne vous empêche de revenir à l’original.

https://www.radiocourtoisie.fr/2021/12/02/ligne-droite-du-2-decembre-2021/

Antoine Solmer

[1] https://blogs.mediapart.fr/guillaume-weill-raynal/blog/020818/quand-la-judeo-facho-sphere-verse-dans-un-racisme-antimusulman-delirant

[2] https://fr.wikipedia.org/wiki/Guillaume_Weill-Raynal