ÉTONNANTS COMMUNISTES : LE PRCF

 

Commençons par les présentations : Le Pôle de Renaissance Communiste en France.

Le PRCF n’est pas un pôle dépendant du bon vieux PC – avec ou sans F – mais une création marxiste-léniniste de militants du PCF échappant à leur maison-mère dont ils regrettaient la « collaboration de classe ». Donc, des purs et durs, adeptes du centralisme démocratique et de la dictature du prolétariat, qui regrettent de ne pas avoir eu vingt ans avec Lénine.

Ah ! Ces communistes ! Ils muent comme le serpent et n’en finissent pas de retrouver la même peau, les mêmes sifflements, le même venin. Alors ils se tortillent, rampent de sinuosités en sinuosités, une petite fois à droite, la suivante, majuscule, à gauche, en sorte que la ligne directrice finale reste la fameuse lutte du même horizon.

Tel est le Pôle de Renaissance Communiste en France dont je viens de lire avec amusement la brochure établie par sa « Commission Femmes ». Son titre est glorieux : Manifeste franchement communiste pour l’émancipation des femmes.

“Franchement communiste”, écrit en rouge sur fond blanc pour focaliser l’attention ! De quel degré est cette plaisanterie ? Si la franchise est le fait de parler fort de ses idées et de ses envies et de ses buts, admettons-la. Mais si derrière ces mots et expressions convenues se cache toujours le même refrain aussi idéologiquement utopiste qu’agressif de la lutte finale, du passé dont on veut faire table rase, et de l’avenir radieux de « déshumains » robotisés, asservis, balancés de séances d’auto-critique en cordes de pendus, alors, je ne peux pas souscrire à cette franchise.

Témoin ce petit opuscule rouge comme un drapeau. Trois têtes féminines agréables et de couleurs allant du pâle au foncé, sous le même fichu, regardent et peut-être sentent la même fleur : un œillet. Cela sent bon la belle camaraderie. Mais un peu plus haut, un discret logo nous ramène aux choses sérieuses. D’un zig-zag qui rappelle des toits d’usine s’échappe par la base une ligne qui s’élève à l’extérieur pour se transformer en symbole féminin : une verticale barrée surmontée d’un cercle. Pour ceux qui l’auraient oublié, cette forme évoque le miroir de Vénus là où d’autres voient un enfantement. Mais pas de conflit inutile : Vénus (autrement nommée Aphrodite) eut pour enfant Hermaphrodite et Cupidon, mais aussi Énée, par l’intermédiaire d’Anchise. Une déesse et un mortel : serait-ce l’une des manifestations heureuses de la réconciliation des classes ? Voilà une idée à soumettre au prochain congrès du PRCF ! Des luttes qui se terminent ainsi, on en redemande. Mais hélas, l’histoire du communisme nous en a donné des démentis majuscules et largement teintés de rouge par le sang versé… des autres. Cent millions de morts, ça finit par valider le poids du mot communisme.

Nous comprendrons d’autant le petit logo avec les deux formules qui accompagnent le titre de la brochure.

La première de Clara Zetkin :

« L’émancipation des femmes comme celle de tout le genre humain ne deviendra réalité que le jour où le Travail s’émancipera du Capital. »

La seconde est de Karl Marx :

« Le degré d’émancipation des femmes est la mesure du niveau de civilisation atteint par une société. »

Pour assainir ces belles déclarations, je préfère revenir à l’œillet de couverture, sans oublier qu’il est souvent associé à la passion révolutionnaire, au moins au Portugal.

UN PREMIER REGARD SUR LA BROCHURE DU PRCF

Bien sûr la figure de Clara Zetkin est portée comme un drapeau :

« Qui, mieux que l’héroïque militante révolutionnaire  et communiste allemande Clara Zetkin, à la fois pionnière de l’émancipation féminine, militante anti-impérialiste émérite pour la paix, co-fondatrice avec Lénine de l’Internationale communiste et déléguée clandestine de l’l.C. lors de la fondation du PCF-SFIC (Congrès de Tours de 1920), peut personnifier l’alliance combative du sexe opprimé, de la lutte anti-impérialiste et du combat prolétarien contre le capitalisme et pour le socialisme ? »

Suivent une série de belles figures dont il n’est pas question de diminuer ni le courage, ni l’aide à la fameuse émancipation féminine.

Mais à ne voir dans ces avancées féminines que l’action du marxisme-léninisme, on retrouve la manie paranoïde de cette forme de pensée. Car, pour cela il leur faut oublier toute la doctrine sociale de l’Église, tous les travaux de médecins préoccupés de santé des plus faibles physiquement (enfants et femmes), et tous les « hommes de bonne volonté ». Il leur faut aussi accuser systématiquement des personnes (des ennemis de classe !) et si cela ne suffit pas, des nouvelles pratiques et de nouvelles organisations. Et ils se disent « progressistes » !

Il leur faut aussi oublier qu’il existe des rythmes « biologiques » d’une société qui demandent plus de temps à s’établir que ceux qui rythment la croissance d’un individu isolé, et que les fameuses avancées que ces personnes ont accompagnées n’ont pu être réalisées que parce qu’elles étaient dans l’air du temps. Le communisme organisé que nous connaissons n’a rien à voir avec toutes les pensées de groupe des temps préhistoriques, et nul ne peut prédire son existence dans les siècles à venir.

Il leur faut aussi cacher que pendant très longtemps la Gauche s’est opposée au vote des femmes, car elles allaient plus à l’église que leurs maris, et pouvaient donc « mal voter ». Il leur faut aussi nier la condition spécifique féminine qui, tout de même, accuse quelques kilos de muscles en moins que l’homme équivalent, et autres « petites différences ». Cela fait beaucoup.

Une phrase typique de la brochure sert d’exemple des dérives obstinées et irréalistes de ces personnages :

« … promouvoir l’idée de parfaite égalité en droits et en potentiel de tous les humains par-delà le sexe biologique et le genre social. »

UN SECOND REGARD SUR LA BROCHURE DU PRCF

Disons et redisons, comme Chesterton, que de bonnes idées peuvent devenir folles. Ajoutons que nous manquons d’études psychologiques des déterminants menant à ce virage vers la folie sociale.

Ainsi se plaindre d’une contre-révolution quand on lance un révolution revient à s’opposer aux lois de la vie, en particulier celle qui veut une réaction à toute action, et ainsi de suite. Les lois de la vie n’étant ni bonnes ni mauvaises. Elles sont aussi neutres que celles de la physiques dont elles se rapprochent étonnamment.

Même cette brochure en convient : « La contre-révolution ne fait qu’exacerber la lutte des femmes pour conquérir l’égalité complète et pour accéder à l’ensemble des possibles humains… »

Malgré ces critiques, il n’en reste pas moins que la pensée de cet opuscule mérite d’être écoutée :

« La contre-révolution mondiale et son pendant européen – cette despotique “construction” euro-atlantique néolibérale qui strangule les nations libres et les acquis sociaux au seul profit des grands capitalistes – exacerbe le besoin d’émancipation des peuples, le désir d’affranchissement des femmes et l’aspiration des travailleurs à une société libérée de l’exploitation capitaliste. C’est pourquoi l’on voit partout les partis maastrichtiens et anticommunistes s’évertuer à dévoyer les luttes en tentant de les confiner dans l’impasse et les leurres idéologiques de 1’“Europe sociale”, du “capitalisme vert” ou d’un féminisme bourgeois ou petit-bourgeois épargnant le capital, ménageant l’impérialisme et tourné contre “les hommes” en général. Comme si l’UE, le capitalisme, l’impérialisme, la domination de classe, le saccage de l’environnement au nom du tout-profit, n’étaient pas structurellement des obstacles majeurs à l’affranchissement général de l’humanité. »

Je saute sur énormément de points qui font justement sursauter toute personne non inféodée pour extraire quelques réflexions sur l’éducation nécessaire :

« Une augmentation des heures consacrées à l’éveil et à la formation d’un esprit scientifique et rationnel (mathématiques pour toutes et tous, sciences expérimentales : physique, chimie, SVT, astronomie et sciences de l’univers … ), ainsi qu’à un apprentissage correct et approfondi de la langue française, socle de tous les apprentissages, de l’histoire nationale et mondiale, de la philosophie, de la littérature, de la géographie, des sciences économiques et sociales, de la musique et des arts plastiques, des technologies, des langues vivantes et anciennes dans toute leur diversité sans privilège aucun accordé à l’anglais, de l’E.P.S., etc. »

« Sur le plan linguistique, nous devons contester l’hégémonie globalitaire de la culture et de la langue de l’impérialisme qui domine la planète, l’impérialisme américain et anglo-saxon : respect de la langue, de la littérature, de la chanson, du cinéma français et francophone, et, bien entendu sans stigmatiser la langue de Marie Shelley ou de Nina Simone, ouverture sur toutes les cultures du monde, africaine, arabe, hispanique, lusophone, germanique, italienne, chinoise, japonaise, etc., sans parler des autres segments africain, américain (Québec) ou européen de la Francophonie internationale. »

« … il importe aussi d’éviter deux pièges. S’agissant des pays francophones, il faut refuser que le féminisme serve de prétexte à tous ceux qui, de Paris à Montréal, de Genève à Libreville et de Bruxelles à Kigali, œuvrent avec acharnement à l’éviction du français au profit du tout-globish de l’euro-mondialisation capitaliste. Non seulement la prétendue “écriture inclusive” – que les élites hexagonales brandissent en fait comme une marque de caste distinctive – n’apporte rien de sérieux aux femmes, mais elle défigure notre langue et la rend illisible et impossible à écrire … En outre, le procès constamment fait au français de privilégier le masculin est absurde puisque dans notre langue, c’est pour des raisons principalement phonétiques que le masculin a fini par occuper les fonctions que le latin attribuait au neutre. Il faut certes féminiser les noms de professions ou de fonctions prestigieuses, parler d’avocate, de principale, de mairesse, dire “Madame la Ministre” quand cela est conforme au génie de notre langue. En revanche, parler de “professeurE”, de “conservateurE” ou de “proviseurE”, c’est seulement détruire la phonétique du français et écraser le  “e” muet final qui est l’une des marques… du féminin et l’un des charmes de notre langue. De telles « avancées » ne sont rien d’autre que des alibis. Ce sont les mêmes gouvernements qui triturent la langue française au nom du féminisme et qui, sous la dictée de l’U.E., s’acharnent à retarder sans cesse l’âge de la retraite tout en majorant sans fin les lourdes décotes qui transforment en retraitées pauvres des millions de citoyennes ayant dû travailler à temps partiel pour élever leurs enfants…

Comme quoi, il arrive que le diable porte pierre !

Antoine Solmer