VOTER AUX LÉGISLATIVES, MAIS POUR QUOI ?

Pour quoi (en deux mots) faudrait-il voter aux législatives ? Telle est la question du jour, qui ne représente qu’un ajout spécifique à l’interrogation basique : “Pour quoi voter ?”. Des remises en questions périodiques sont nécessaires, certains jours plus que d’autres, par exemple en ce lendemain de “législatives”. Précisons : non seulement se remettre en question, mais aussi et surtout remettre en question le système.

ÊTRE ICONOCLASTE PAR DEVOIR

N’ayons pas peur de paraître iconoclaste ! Mieux, sachons nous entraîner à devenir iconoclastes, surtout lorsque les icônes ont été tellement dégradées qu’elles salissent les mains de ceux qui auraient souhaité leur redonner du lustre… pour des lustres.

Pour quoi voter ? Théoriquement, pour valider, entretenir et nourrir la démocratie. Noble idéal ! Mais combien dégradé ! En somme, contrairement aux Hindous qui laissent les vaches sacrées vagabonder à leur guise, nous entretenons la nôtre : la sainte Démocratie, encombrée de ses serviteurs zélés, attachés à en récolter les bouses jusqu’à ce que leurs mains s’emplissent d’or. La poule aux œufs d’or est dépassée. Il est venu le temps des bouses aurifères. Votez bravez gens !

Avons-nous péché par excès de pudeur, de naïveté, d’impréparation à la vie ? Ce n’est pas impossible. Avons-nous tant d’amis sûrs, que nous ayons projeté leurs qualités et nos attentes sur des inconnus aux sourires formatés et aux dents acérées ? Des amis à qui nous pourrions laisser les clefs de la maison et du coffre-fort sans le moindre doute et partir le cœur serein pour un long voyage ? Un voyage de cinq ans, et parfois de dix ? Je ne le crois pas. Et l’expérience de cette projection de l’ami si rare vers le faisan de passage me convainc que j’avais raison.

Peut-être, en des temps anciens, l’un quelconque de ces oiseaux (allons jusqu’à en trouver deux ou trois autres) a-t-il mérité cette confiance. Mais au stade où nous en sommes arrivés, avec le personnel qui est ressorti de cette double truanderie qu’ont été l’élection présidentielle et les dites “législatives”, il faut se rendre à l’évidence : la vache sacrée s’est confortablement installée dans les écuries d’Augias, et nul Hercule ne s’est présenté pour les nettoyer.

Alors, puisque ça pue à ce point, pourquoi prétendre nettoyer l’ensemble avec un minuscule bout de papier, dont la taille ridicule ferait rougir tout honnête fabriquant de PQ ? Combien d’entre nous se complaisent à cette tâche jusqu’à se salir eux-mêmes.

REVENONS AUX “LÉGISLATIVES”

Théoriquement nous élisons des “législateurs” pour faire des lois. Qu’en est-il vraiment ? C’est ici qu’il faut revenir aux bases, tellement ignorées de ceux qui croient “servir la démocratie”.

Les lois nous arrivent par deux chemins : celui des propositions (émanant de l’Assemblée législative) et celui des projets (émanant du gouvernement). Je vous laisse faire votre propre enquête, mais depuis quarante ans et plus, seules 5% des lois proviennent de propositions.

Donc, l’assemblée dite “législative” et les élections du même acabit ne méritent ce qualificatif qu’à 5% au mieux. Si vraiment la démocratie émerge des urnes par et pour le peuple, ce n’est qu’à 5% au mieux. Quelque chose “cloche” !

Encore faudrait-il étudier en détail la qualité et la portée de ces lois émanant des prétendus “législateurs”.  Un travail de bénédictin… ou de béni-oui-oui dans lequel je n’entrerai pas car, si l’on réfléchit bien, il y a pire.

LA PRÉTENDUE SÉPARATION DES POUVOIRS

Puisque seules 5% des lois émanent des députés prétendus “législateurs” c’est que 95% proviennent du gouvernement (les projets de loi). C’est-à-dire que ces 95% émanent du pouvoir exécutif.

Alors, que devient la fameuse théorie de la séparation des pouvoirs (législatif, juridique et exécutif) qui est censée représenter l’une des pattes de notre vache sacrés ? C’est peut-être pour cela qu’elle est plus que jamais mise sous le boisseau, et que l’animal boite chaque jour davantage, à force de s’y cogner les paturons.

RESTE UN ESPOIR

Paradoxalement — mais normalement, à mon idée — l’espoir réside dans l’homme, capable du pire (le plus souvent, surtout dans ces conditions) mais aussi du meilleur (autant que les récupérateurs de bouses en or lui en laissent l’occasion et le temps).

Pour être franc, la seconde possibilité est rare, et l’on a vu comment elle a été écrasée par l’ensemble de la “classe politique”.

Alors, pour quoi voter ? Ce sera l’objet d’un prochain article.

Antoine Solmer

Abonnez-vous à notre lettre d'information et rejoignez les 14 autres abonné·es.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *