VIVE PAVLIK MOROZOF ! VIVE PAVLIK MACRONOF ! (3)

L’article précédent insistait sur les modifications, implémentations et autres complications apportées à cette loi anti-tout le monde par des députés assez pointilleux pour que leurs coups d’aiguilles répétés sur les citoyens préjugés mal-pensants finissent par les emporter par une hémorragie chronique.

Il y a du vampirisme dans de tels comportements. Comme le célèbre Dracula avait ses ancêtres, il a maintenant ses épigones, suiveurs moralistes et moralisateurs. Avec de tels parle-tellementaires, il y a de quoi se faire un sang d’encre, même sur le plus sec des claviers, ou dans l’intimité du foyer. C’est qu’il n’y vont pas de mains mortes, ces mini-bat-man et bat-woman. Ils sont en chasse. Une chasse où tout gibier est bon. Tout ou presque. Il y a un louis d’or à gagner contre trois cacahuètes pourries que certains hurlerapeurs échapperont à toute condamnation de mauvaise pensée anti démocratique. On l’a vu, on le voit, on le reverra. En effet, toutes les modi-morti-fications de cette loi si bien proposée et si bien votée, ne feront que favoriser la chasse aux gibiers réticents. Une sorte de bombe à fragmentation. Contre tout ce qui passe. Tant pis pour les malchanceux. Bien fait pour les phynances étato-lemairo-macronoviennes ! Avec la bonne conscience fabriquée en fer blanc par dessus le marché.

Parmi les critères d’une loi juste, en voici un : elle ne contenir ni adverbe ou locution adverbiale (modifiant le sens du verbe) ni adjectif autre qualificatif modifiant et perturbant le sens des noms. Les verbes doivent être simples et ne pas porter à multiples interprétations. Quant aux phrases, elle devraient respecter au plus près la règle sujet-verbe-complément. On pourrait penser aussi à utiliser avec le choix de la précision, des listes de situations, éventuellement complétées d’une quantification de gravité. Cela est possible dans certains cas.

En l’état de l’État, le salmigondis règne et Macronof en est le roi, bien secondé par un Dupont, je dirais même plus, par un Moretti. Pardon Hergé pour cette mauvaise plaisanterie !

Qui dit loi compliquée, sujette à interprétations doit conclure : loi d’exception. On a toujours le tort de penser que les lois dites « d’exception » s’appliquent à des situations où le sort du pays est en jeu, où la guerre frappe à nos fenêtres et où l’ennemi entre par nos portes ouvertes. C’est faux. La preuve : il n’y en a pas actuellement, et le moins qu’on puisse dire est qu’on ne compte plus les carreaux cassés et les serrures fracturées de la maison France. En réalité, dans l’ambiance gauchojudiciaire actuelle, tout procès devient d’exception selon que vous serez catalogué comme gentil ou coupable d’avance. Car tel est un des modes de pensée de la Gauche, dans tous les pays et dans toutes les situations. Le juridisme n’y est que la forme dérivée de l’exécutif. Bien contents serez-vous si cet « exécutif » ne tourne pas à l’exécution publique et didactique. Il faut que le peuple comprenne et apprenne, quitte à serrer les fesses ou à se faire serrer le cou.

Toutefois, la fameuse loi proposée-projetée-imposée va plus loin. Elle sépare deux cas : le public et le non-public.

Déjà, s’emparer de la menace tout azimut dans le public, c’est mettre à la poubelle la liberté d’expression qui devait être un sanctuaire. Un de plus, avec l’école, l’hôpital, en attendant les autres que l’on laissera violer sans autre commentaire que « la plus ferme détermination… de ne rien f… »

Mais cette loi n’est qu’un copier-augmenter des précédents gayssotiste, perbeniste, et autres. Les Français n’en ont pas encore assez soupé. On va leur en mettre jusqu’au gosier. Et en même temps, plein la gueule. Il va bicher le Macronof.

Or, la situation se complique. Qu’est le public et qu’est la non-public ? Haro sur le malappris qui traduirait non-public par privé ! Ici, je me laisse bercer par les explications de Simon Husser, dont j’ai déjà parlé dans cette série. Première partie de la berceuse : « s’il est vrai que les contours de notions telles que “la haine” ou la “discrimination” ne sont pas toujours très clairement tracés, des études sérieuses ont bien montré que toute blague raciste ou sexiste ne tombe pas nécessairement sous le coup de la loi. » Ouf !

Ouf ! Et oui mais… ! Dans l’article cité1, je lis, concernant la distinction entre le propos publie et non public : « En pratique, cette division n’est pas binaire. En effet, la Cour de cassation opère une distinction ternaire entre les propos confidentiels, non publics et publics. Les premiers échappent aux griffes du droit pénal. » Ce troisième larron apparu, le confidentiel, rebat les cartes. Sa différence entre lui et le non-public peut avoir l’épaisseur d’une gommette servant à accrocher votre tronche sur un quelconque « mur des cons ».

En pratique, vous serez pratiquement obligés de passer par la Cour de cassation (unique et intouchable) pour espérer qu’éventuellement vos propos soient changés de case. N’oubliez pas de prier saint Yves patron des avocats ! Pour les juges, Dupont-Moretti n’étant pas canonisé, pas encore, je ne vous le conseille pas. Encore que… il arrive que le diable porte pierre.

Cela posé, voici qui doit vous rassurer « il importe de mettre l’accent sur l’essentiel : les conversations tenues dans un cadre familial ou purement interpersonnelles ne pourront pas être punies. »

Le rapporteur du texte­ — ouh les cornes ! — s’est fendu d’une prose assassine : « Que les racistes et haineux de tous bords se rassurent, ils pourront continuer à déverser leur haine lors de leurs petits dîners privés ! » Quelle élégance ! Quels regrets ! Comme il doit souffrir, ce brave rapporteur ! Plaignons-le ! Comme il doit regretter de ne pas avoir vécu sous la Terreur ! Comme il doit attendre un nouveau 1793 ! Comme il doit prier la sainte bécane à Sanson, à Deibler et autres ! Et surtout quelle injonction subliminale aux juges qui hésiteraient à qualifier des propos comme « confidentiels » ou « non-publics » ! Il faut toujours savoir lire entre les lignes, et mieux, les lire à l’envers. Vous l’aurez compris : la chasse est ouverte. Sans limitation de période, sans limitation de moyens.

Alors, je conseillerais volontiers de lire Mathieu Bock-Côté dans Le Figaro:  « tôt ou tard, les dîners tomberont aussi sous le coup de la loi ». Techniquement parlant : viendra le temps où la vie privée « sera placée sous surveillance étatique. » Et en pratique, dans un pays qui a un autre sport national que le foot : espérons de ne pas arriver à « un appel à la délation généralisé ».

Je crains que M. Husser ait oublié ou négligé l’histoire de France, les écoutes US des hommes politiques français, celles qui ont donné lieu à l’affaire des « Écoute », les dossiers reçus par la Kommandantur aux heures les plus sombres… et même certains épisodes de voisinage peu glorieux du Covid.

J’en reviens à Pavlik Morosof et à son émule Macronof.

Pavlik fut assassiné à devint 14 ans en 1932. La grande Histoire, dit qu’il dénonça son père pour des propos anti-collectivisation. En plein communisme russe, c’était un devoir. L’affaire lui valut de recevoir comme titre officiel : « pionnier-héros numéro 001 de l’Union soviétique ». Que l’histoire réelle ait été plus sordide, moins « communistement glorieuse », peu nous chaut. L’essentiel est la romance que Staline en tira, l’exemple de la délation récompensée, et la vague de dénonciations intra-familiales qui déferla pendant la soixantaine d’années avant que le régime ne périclite.

Le simple fait de citer le nom Pavlik Morozof il y a quelques jours à un ami qui en avait vécu la dure réalité, le fit tressaillir. Sa réaction valait un long discours, de la part d’un homme qui avait risqué sa vie en s’enfuyant du paradis communiste.

Espérons que Macron n’ait pas engendré une vague de fils prodigues, des Pavlik Macronof !

Antoine Solmer

1 https://www.lejdd.fr/societe/nos-conversations-privees-vont-elles-vraiment-etre-surveillees-143229