Le grand déclassement

  Après la récréation souriante d’hier, “les affaires reprennent” ! Je n’ai ni l’honneur ni le plaisir de connaître Alexis Brézé, actuel Directeur des rédactions du Figaro. Et pourtant, j’aimerais bien ! Un homme qui offre à ses lecteurs une analyse du “Mal français” aussi claire que celle qu’il a proposée la semaine dernière mérite qu’on rende hommage à sa clairvoyance.  Comme cela nous arrive de temps en temps, c’est à lui que je confie – avec une joie certaine – la ligne directrice de cet éditorial : il est difficile de commencer 2023 et de subir le cortège de catastrophes qui devrait l’accompagner, selon toute logique, d’une manière plus “visionnaire” – hélas.

“À l’aube de l’année 2023, écrit Alexis Brézé, c’est un sentiment dramatiquement désespérant qui prévaut, une curieuse impression que tout se détraque, que tout se délabre, que tout se déglingue, la sensation bizarre que la campagne présidentielle n’a servi à rien, et la désolante perception que la France est sur le chemin d’un grand déclassement, comme une marche qu’on a descendue et qu’on a bien du mal à remonter…”. Un des symboles humiliants de cette déconfiture est, bien sûr, le désastre de notre industrie nucléaire, ce joyau délibérément saboté soi-disant pour plaire à quelques écologistes en mal de destruction, et sacrifié sur l’autel de la “combinazione” électorale, de la stupidité de théoriciens bornés, de la lâcheté des politiciens, et de l’impéritie de nos technocrates : là où la France possédait un outil unique au monde conçu pour faire face à tous les défis, nous voilà devenus comme un pays sous-développé, sous la menace permanente de coupures d’énergies.

Plus humiliant encore, peut-être : dans le novlangue d’un Olivier Véran, ce porte-bobards officiel de la propaganda macronienne, cet échec complet se traduit par : “Il se pourrait que certains jours, la production et la fourniture d’électricité ne soient pas totalement alignées”... C’est une honte ! D’autant plus que la seule et unique raison pour laquelle nous avons pour le moment échappé aux coupures de courant, c’est que le réchauffement climatique –au nom duquel la bande de nuls dont ce triste sire fait partie rêve de nous priver progressivement de toutes nos libertés, une par une pour que ça se voie moins– leur a offert un cadeau inespéré et immérité : le printemps à Noël, seul et unique responsable de l’actuelle baisse de consommation de gaz et d’électricité. Ils peuvent dire un vrai “Merci” à ces gaz dits à effet de serre dont ils disent, pourtant, tant de mal ! Leur nullité est vraiment encyclopédique !

Mais chacun se rend bien compte que, derrière le nucléaire, c’est la totalité de nos “services publics” (dont nous étions si fiers alors qu’ils nous coûtent si cher) qui se délitent durablement sous nos yeux, sans remèdes visibles : transports, école, police, hôpitaux, état des routes et des trains, délabrement des monuments, et j’en oublie… L’insécurité galope, l’immigration est hors de contrôle, notre industrie est en miettes, et la dette de l’État en explosion vertigineuse ! Des actes aussi simples que prendre rendez-vous chez le médecin (et en trouver un, souvent), renouveler un passeport, acheter un billet de train à la gare, envoyer une lettre, faire le plein d’essence parfois… sont devenus des actes proches d’exploits héroïques : plus on est étouffé par les impôts et les taxes et moins les résultats sont au rendez-vous !

Et s’il n’y avait que ça ! “Ils” ont laissé se développer et la peste et le choléra (ie. la drogue partout et le tsunami “woke”, à peine moins grave, à terme) et ils ont ainsi ajouté au naufrage de l’État la destruction volontaire – et totalement injustifiée puisque injustifiable – de la totalité des repères intellectuels, moraux, sociaux et anthropologiques qui structuraient toute vie en société et rendaient possible le “vivre ensemble”, cette ex-réalité dont “ils” ont fait une impossibilité définitive, en prétendant remplacer un état de fait par d’ineptes abstractions intellectuelles et technocratiques –donc insoutenables : la destruction de la famille, de la filiation, de la complémentarité des sexes, de l’ordre des choses et des gens… et en rendant non-viables les verbes écrire, parler, penser, aimer, regarder, décrire, voir et oser !

Il ne serait pas juste, commente Alexis Brézé, de faire porter au seul Emmanuel Macron tout le poids des drames qui s’annoncent ou qui sont déjà perceptibles. Il n’empêche, ajoute-t-il, que c’est lui le responsable en titre, et qu’il a tout fait pour accélérer ces mouvements mortels. “Voyageur sans bagages, héritier de personne et venu de nulle part, Emmanuel Macron s’imaginait pouvoir être à lui seul sa propre justification et sa propre cause. Le voici condamné à ne plus être que le responsable de ses conséquences’’. La fracture civique qui se creuse est un ’‘trou noir” qui avale tout, jusqu’à la colère – qui est pour le moment  anesthésiée par le découragement général mais qui reste présente dans un “à quoi bon” qui refait surface ! Il faut redouter le jour où le peuple se réveillera. Il  s’est entraîné, hier…

Pour un tout petit bout de temps, il est encore possible de remettre les choses en place – ou de tenter de le faire, pour n’avoir rien à se reprocher. On n’en prend pas le chemin : ce n’est pas en  luttant “contre les inégalités de genre” (sic !) qu’on va redresser l’école… ce n’est pas en “emmerdant” jusqu’à ce que mort s’ensuive les non-vaccinés dont tous les services si malheureux (hôpitaux, soins-en-ville et casernes de pompiers) ont un besoin qui, de criant, est devenu hurlant… ce n’est pas en inventant un nouveau titre de séjour pour ne pas avoir à sauver la France de l’immigration massive et incontrôlée –et de plus en plus mal intentionnée. Ce n’est pas en faisant de la légalisation du suicide et du meurtre assistés une grande cause nationale qu’on peut espérer sauver le peu qui reste : ces jeux mortifères ont trop servi. Ils sont archi-usés et  ne sont plus que néfastes ou carrément malfaisants.

Ce n’est pas, non plus, en continuant à mentir aux Français sur les causes, les raisons d’être et les analyses de tous les maux qui nous frappent – dont les sources remontent parfois à 1945 (la main-mise des staliniens sur la SNCF et EDF, via la CGT), à mai 1968 (les attentats contre la Culture, l’Histoire… et la Vérité), et à 1982 (les immenses mensonges de Mitterrand imposant à la réalité les dystopies de la Gauche). Ces causes, qui ont toutes été voulues par la Gauche, voient donc leurs conséquences soigneusement ‘’oubliées’’ par une Presse pour moitié rose-foncé, pour moitié rouge-trotsko, et entretenues et exacerbées par la macronie (elle, plutôt ‘’rouge-honteux’’), qui restera coupable et responsable devant l’Histoire… s’il reste encore une Histoire à écrire et des cerveaux libres pour la lire… ou la regretter…

Pourtant, il ne faut pas désespérer : les voies du futur, comme celles du Seigneur, sont impénétrables, et je me refuse à jeter le manche après la cognée (ou, pour être en harmonie avec les idées mortifères à la mode : “jeter le bébé avec l’eau du bain” : comme il n’y a plus de bébés, on ne jettera pas grand chose d’autre que… nos rêves détruits). De toutes manières, tout devrait, en toute logique, aller si mal, très bientôt, qu’il se pourrait bien que, pour des raisons encore imprévisibles, le “changement de logiciel” si espéré et si nécessaire se produise au moment où on l’attendra le moins : s’il est vrai que les Français ne réagissent que lorsqu’ils sont tout au fond du trou… notre réveil est imminent ! Il faut garder l’espoir…

H-Cl, avec l’aide précieuse d’Alexis Brézé